REJET DE L’APPEL PORTANT SUR LES ÉCOLES FRANCOPHONES EN COLOMBIE-BRITANNIQUE. EST-IL TEMPS DE SAISIR LA COUR SUPRÊME DU CANADA ?

La Cour d’appel de la Colombie Britannique a rejeté aujourd’hui, mercredi 25 juillet, l’appel interjeté par le Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique (CSF), la Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique (Fédération des parents) ainsi que des parents co-appelants à l’encontre du jugement rendu par la juge Russell en 2016.

L’analyse du jugement ne fait que commencer. Toutefois, à première vue, la Cour d’appel semble avoir rejeté, brouillé ou contourné plusieurs enseignements de la Cour suprême du Canada. Il est possible que la plus haute Cour du pays souhaite entendre un appel vu l’importance des conclusions de la Cour d’appel pour l’avenir du français dans cette province et pour le reste du pays.

L’appel du CSF, de la Fédération des parents et des parents co-appelants tournait notamment autour des deux axes suivants :

  • L’équivalence réelle. Dans son jugement, la juge Russell conclut erronément que l’on détermine si l’équivalence est atteinte entre une école du CSF et les écoles de langue anglaise qui lui font concurrence en comparant des écoles ayant des effectifs similaires et des immeubles dont la capacité est similaire, voire identique. La Cour d’appel adopte cette analyse sans réserve. Une telle analyse désavantagera presque toujours la minorité linguistique. Les tribunaux de la Colombie-Britannique s’intéressent à la « proportionnalité » entre les édifices scolaires du CSF et ceux de la majorité de langue anglaise ; ce faisant, ils font violence au critère d’« équivalence réelle » énoncé par la Cour suprême du Canada.
  • L’article premier de la Charte canadienne des droits et libertés (Charte). L’appel remettait en question la conclusion de la juge Russell voulant que l’article premier de la Charte puisse être invoqué avec succès par une province aussi riche que la nôtre pour justifier des atteintes à l’article 23. Selon la Cour d’appel, fournir aux francophones les édifices scolaires auxquels ils ont droit coûterait trop cher. Voilà non seulement la première fois qu’une cour d’appel tire une conclusion de la sorte, mais jusqu’à maintenant et sauf exception, ce ne sont que les situations de crise financière qui ont mené la Cour suprême du Canada à « justifier » une enfreinte aux droits garantis par la Charte, quels qu’ils soient.

Rappelons que de nombreux gains avaient été réalisés devant la juge Russell dans le procès en matière d’éducation de langue française opposant les demandeurs au ministère de l’Éducation, notamment la création d’une enveloppe de financement en matière d’immobilisations réservée aux écoles de langue française. Ces gains demeurent intacts, à une exception près : la juge de procès avait conclu qu’en raison d’une décennie de sous-financement structurel en matière de transport scolaire, la Province devait maintenant corriger cette enfreinte constitutionnelle en payant au CSF six millions de dollars en dommages-intérêts. Les juges de la Cour d’appel ont rejeté cette dernière conclusion. En raison des critères énoncés aujourd’hui par la Cour d’appel, bien plus rares seront les dommages-intérêts octroyés à ceux dont les droits garantis par la Charte ont été brimés.

La décision de saisir la Cour suprême du Canada sera prise au cours des prochaines semaines.

« Le jugement rendu ce matin est un coup dur pour l’éducation de langue française en Colombie-Britannique, dont les besoins sont majeurs et urgents », explique Marie-France Lapierre, présidente du CSF. « J’attends avec impatience que l’on termine d’analyser le jugement d’aujourd’hui afin de déterminer la prochaine étape, incluant la possibilité de se rendre à Ottawa, devant la Cour suprême du Canada. ».

« Le jugement nous déçoit énormément. Nous avions espoir que la Cour d’appel tranche en notre faveur », affirme Suzana Straus, présidente par intérim de la Fédération des parents. « L ’impact du jugement sur les communautés d’expression française ainsi que sur l’avenir des écoles m’inquiète surtout en considérant l’essor démographique de notre communauté en Colombie-Britannique. »

Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique
Depuis sa création en 1995, le CSF offre des programmes et des services éducatifs valorisant le plein épanouissement et l’identité culturelle des apprenantes et apprenants francophones de la province. Partenaire dans le développement de la collectivité francophone de la Colombie-Britannique, le Conseil compte aujourd’hui plus de 6 000 élèves et 40 écoles – dont 24 écoles homogènes – et dessert une centaine de communautés réparties dans l’ensemble de la province.

Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique
Fondée en 1979, la FPFCB regroupe 47 associations de parents des secteurs scolaire et préscolaire. Elle a pour mission de rassembler, de représenter, d’appuyer et d’outiller les parents dans leur rôle de premier éducateur et de promouvoir leur engagement et leur participation à la création d’un milieu francophone vivant et exemplaire.

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